Les carnets d'Éthiopie d'Antoine d'Abbadie

Inscrit dans le cadre du plan quadriennal de la recherche 2020-2023 de la BnF, le projet de recherche MSS-Abbadie a pour objectif de transcrire, analyser et éditer les carnets de notes d’Antoine d’Abbadie (1810-1897), savant voyageur qui séjourna en Éthiopie de 1837 à 1848.
 

Antoine d’Abbadie est né en 1810 à Dublin dans une famille noble d’origine basque, émigrée en Irlande au début de la Révolution française et revenue s’installer à Toulouse en 1820. Dès l’âge de 19 ans, il se prépare soigneusement, pendant près de six ans, à son projet d’explorer l’Éthiopie. Il souhaite y observer les sources du Nil et les peuples de la Corne de l’Afrique, avec l’espoir de rétablir les chrétiens d’Éthiopie dans la voie catholique.

Constantin Ier trônant, Miniature d’un psautier éthiopien, Tigré, XVe siècle – BnF, département des Manuscrits

Une collection conçue pour représenter la culture éthiopienne

Son séjour sur place entre 1837 et 1849, relaté par son frère Arnauld d’Abbadie (1815-1893) dans l’ouvrage Douze années de séjour dans la Haute-Éthiopie, constitue une intense période de travail. Antoine d’Abbadie y rédige une vingtaine de carnets de notes et collecte 192 manuscrits, augmentés d’une quarantaine qui lui seront envoyés après son retour. Le savant éditera lui-même le catalogue de près de 200 de ces manuscrits dès 1859. Cette collection, constituée dans le but de représenter la culture et l’histoire éthiopiennes, est léguée à sa mort en 1897 à l’Académie des sciences. Déposée à la Bibliothèque nationale de France en 1902, elle permet alors de doubler en nombre de volumes les manuscrits éthiopiens qui y étaient conservés. Aujourd’hui, la quasi-totalité des manuscrits éthiopiens rassemblés par Antoine d’Abbadie a été numérisée et est disponible en ligne dans Gallica.

Des sources de premier plan pour la connaissance de l’Éthiopie du XIXe siècle

Une grande partie des notes consignées dans les carnets de voyage, dont certaines précisent les conditions dans lesquelles furent acquis les manuscrits, sont restées inédites et ont encore beaucoup à révéler de l’Éthiopie des années 1840. Elles constituent une mine de renseignements, tant sur l’Éthiopie du début du XIXe siècle, que sur les méthodes et les outils à la disposition du savant pour ses enquêtes ethnographique, géographique, linguistique ou encore météorologique, dans des régions alors encore très peu documentées. Antoine d’Abbadie est en effet l’un des tout premiers savants européens à avoir séjourné autant d’années dans la Corne de l’Afrique, s’imprégnant de la culture et des langues éthiopiennes, côtoyant aussi bien les chrétiens des hauts plateaux de langue amharique et tigriña que les nomades musulmans saho et afar des basses terres ou les Oromos des régions au sud du Nil Bleu.

Un projet de transcription associant la BnF et le CNRS

La richesse de cette source d’information très complète, ancienne et difficile d’accès, a donné naissance à un projet qui associe le département des Manuscrits de la BnF et le CNRS, dans le cadre du plan quadriennal de la recherche de la BnF 2020-2023. Il vise, après avoir numérisé et mis à disposition sur Gallica les carnets d’Antoine d’Abbadie, à les transcrire sur une plateforme collaborative afin d’en préparer une édition électronique et de rendre lisible et exploitable ce témoignage exceptionnel.
Mathilde Alain, Vanessa Desclaux, Anaïs Wion
Article paru dans Chroniques n° 92, septembre-décembre 2021