L’œuvre de Matisse à la portée de tous

Le fonds d’estampes et de dessins d’Henri Matisse conservé à la BnF, constitué de plusieurs centaines de pièces, est le plus important conservé dans une collection publique en France et dans le monde. Alors que l’œuvre du peintre, décédé en 1954, vient d’entrer dans le domaine public, cet ensemble fait l’objet d’une campagne de numérisation d’ampleur.

 

Œuvre d’Henri Matisse en cours de numérisation dans l’atelier du département Images et prestations numériques de la BnF © Élie Ludwig / BnF

 

Fruit du dépôt légal et de plusieurs donations consenties par les descendants de l’artiste entre 1978 et 1981, le fonds Matisse de la BnF, conservé au département des Estampes et de la photographie, est riche d’environ 660 œuvres, parmi lesquelles 628 estampes (gravures sur bois, lithographies, gravures en taille-douce) et neuf monotypes. S’y ajoutent 25 dessins dont la plupart sont des études préparatoires pour l’illustration de livres – Poésies de Mallarmé publié chez Skira en 1932 ou Ulysse de James Joyce, pour lequel l’éditeur américain Georges Macy avait commandé à l’artiste 26 gravures. Plus inspiré par L’Odyssée d’Homère que par le monologue intérieur de l’auteur irlandais – qu’il avouera plus tard ne pas avoir lu –, Matisse réalisa une série d’études au crayon et à la sanguine avant de commencer les estampes. « Certains de ces dessins sont actuellement prêtés au Louvre Lens pour l’exposition Exils. Regards d’artistes qui se tient jusqu’au 25 janvier 2025, indique Céline Chicha, cheffe du service de l’Estampe moderne et contemporaine. C’est le cas de beaucoup de ces œuvres, souvent prêtées pour des expositions hors les murs, sans compter celles que la Bibliothèque a consacrées, en 1970 et en 1982, à son œuvre gravé. »

Une collection accessible sur Gallica

Grâce à l’entrée de l’œuvre de Matisse dans le domaine public depuis le 1er janvier 2025, toutes les images du fonds peuvent aujourd’hui être consultées librement. Le département Images et prestations numériques de la BnF travaille depuis plus de deux ans à la numérisation de la collection. « Nous avons avancé en bonne intelligence avec les ayants droits de Matisse qui conservent le droit moral sur l’œuvre et restent très attentifs à la qualité des reproductions » souligne Patrick Bramoullé, chef du service Production. Plus de 300 œuvres sont d’ores et déjà accessibles à tous dans la bibliothèque numérique Gallica et la collection sera complétée au cours de l’année 2025. Les images peuvent également être achetées en haute définition sur la banque d’images de la BnF, notamment destinée aux éditeurs, iconographes et professionnels de l’audiovisuel et du multimédia.

Un corpus très divers

« Nous disposons de nombreux outils techniques qui permettent de s’adapter aux différents supports, précise Vincent Tessier qui a photographié le fonds Matisse. Chaque document est spécifique et la manière dont nous procédons pour le numériser dépend de ses particularités. On ne fait pas de miracles avec les logiciels de numérisation : le plus fondamental est de mettre en place un éclairage bien adapté aux caractéristiques de l’original. » Installé dans les sous-sols du site Richelieu récemment rénové, l’atelier de reproduction numérique traite 300 000 images par an : estampes, manuscrits, cartes et plans, objets antiques, monnaies et médailles. Un corpus très divers auquel s’ajoutent les estampes modernes et contemporaines qui, en attendant d’entrer dans le domaine public, sont consultables sur Gallica intra muros dans les emprises de la BnF.

 

Sylvie Lisiecki

Article paru dans Chroniques n° 102, janvier-mars 2025