L'origine de l'expression « la trêve des confiseurs »

Pourquoi parle-t-on de la trêve des confiseurs entre Noël et le jour de l’an ? On pourrait croire que ce sont les confiseurs qui se reposent mais en fait non, c’est toute la contradiction de cette expression, il s’agit à l’origine d’une trêve politique pour laisser la place libre au commerce. 
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Origine du mot « trêve »

Intéressons-nous au mot trêve. Il a son origine au XIIeme siècle, du francique « treuwa » signifiant contrat, traité, convention. On trouve aussi dans le latin médiéval l’expression trewa dei, la trêve de Dieu par laquelle l’Église limitait les guerres privées en interdisant toute hostilité entre seigneurs du mercredi soir au lundi matin et à certaines époques de l’année (Avent, Noël, Carême, Pâques). 

Il apparait sous la forme trieve dans le Roman de Troie (1165) au vers 24271.


Le mot trieve perd son i autour de 1330 et gagne bien plus tard, au XVIIIème siècle, comme on le voit dans le Dictionnaire de l’Académie française (1740) un accent grave. Puis finalement, l’Académie française choisit trêve à partir de 1798.
 

 

 

Une décision politique

Ce qui nous amène à la trêve des confiseurs, expression qui a émergé dans le contexte des débats politiques plus que vigoureux entre parlementaires républicains, monarchistes et bonapartistes en décembre 1874 sur la future constitution.

Dans la Grande Encyclopédie de Berthelot, sous l’article « assemblée », on peut lire « de crainte de nuire au commerce parisien, on ajourna la discussion ; c’est ce que l’on nomma la trêve des confiseurs ».

On sait que même la longueur de la pause suscita les plus vifs débats. L’expression elle-même semble créée par de mauvais plaisants, écrit le duc Albert de Broglie page 330 de ses mémoires car on ironisa forcément sur ce « repos » que s’accordèrent les parlementaires pendant la période entre Noël et le 1er de l’An.

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Les semaines suivantes, les débats reprennent et le 30 janvier 1875, l’Assemblée nationale adopte l’amendement proposé par Henri Wallon ayant pour objet d’insérer un article additionnel après l’article premier du projet de loi constitutionnelle sur l’organisation des pouvoirs publics, et aux termes duquel « le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages par le Sénat et la Chambre des députés réunis en Assemblée nationale. Il est nommé pour sept ans. Il est rééligible. » La République était fondée.


On ne saura jamais si cette trêve des confiseurs aura vraiment profité aux débats entrainant la consolidation de la République mais la tradition a perduré et profite à tous désormais.