Rapport d'activité 2020 – Le dépôt légal

Dépôt légal des imprimés © David Paul Carr / BnF

Régi par le Code du patrimoine, le dépôt légal est l’obligation pour tout éditeur, producteur, distributeur, importateur de déposer à la BnF chaque document qu’il édite, produit, distribue ou importe en France. Conformément à la loi du 1er août 2006 relative aux droits d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information (DADVSI), la Bibliothèque a aussi en charge le dépôt légal de l’internet.

Les évolutions du dépôt légal

Depuis 2009, les éditeurs ont la possibilité de faire leurs déclarations de dépôt en ligne. Près de 34 000 déposants y sont inscrits. Les données des déclarations sont directement intégrées dans le site Nouveautés éditeurs et dans le Catalogue général de la BnF, permettant ainsi un premier signalement de la production éditoriale. En 2020, plus de 60 172 documents ont été reçus avec cette déclaration en ligne dont 4 865 documents sonores dématérialisés et 45 livres numériques dans le cadre des expérimentations de dépôt légal numérique. Près des deux tiers des déclarations sont désormais dématérialisées. Pour les livres, ces déclarations en ligne représentent près de 73% des documents déposés, pour les partitions 78% et pour les documents cartographiques 84%.

L’année 2020 a aussi vu se poursuivre la montée en charge de la déclaration de « dépôt légal automatisé » qui permet aux distributeurs de livres des grands groupes d’édition, mandatés par les éditeurs, d’adresser leurs déclarations par flux au format ONIX (ONline Information Exchange. La norme ONIX for books est un format d’échange de métadonnées). Ce transfert automatisé des métadonnées améliore la fluidité des circuits pour les déposants comme pour la BnF. Il est en augmentation constante avec 28% des livres déposés en 2020. Huit partenaires utilisent désormais ce service : quatre groupes (Hachette Livres, Interforum/Editis, Humensis), les plateformes Books on Demand et Edilivre, les maisons d’édition Dargaud, L’Harmattan et les Éditions du Net, pour 258 marques (230 en 2019).

Ces innovations concrétisent l’adaptation du dépôt légal à l’évolution numérique de la production éditoriale, qu’il s’agisse des outils de gestion, des métadonnées ou des documents eux-mêmes. Dans cette perspective, l’année 2020 a vu se poursuivre les différents chantiers permettant d’expérimenter le dépôt légal des documents numériques. En lien avec le ministère de la Culture, les rencontres avec les associations d’éditeurs et de producteurs de documents audiovisuels dématérialisés (son, image animée, jeu vidéo, etc.) se sont prolongées.

Pour les livres numériques, le chantier technique a vu la mise en production de la chaîne d’entrée et de traitement, du dépôt du fichier jusqu’à sa consultation par les chercheurs dans les emprises de la BnF, en passant par le catalogage et la conservation pérenne. Fin 2020, 539 livres numériques de l’éditeur Publie.net entrés par dépôt légal sont signalés au Catalogue de la BnF et sont consultables dans Gallica intramuros. L’expérimentation se poursuit avec une proposition de dépôt légal dématérialisée d’un autre éditeur volontaire, Les Éditions du Net.

La chaîne d’entrée par flux du dépôt légal du son dématérialisé (DLSD) est entrée en production en décembre 2019 : les documents déposés sont composés de fichiers audio au format FLAC, de métadonnées descriptives et de visuels des pochettes. Le distributeur Idol, qui a déposé 4 460 documents, devient ainsi le principal déposant de phonogrammes, tous supports confondus. Les notices, générées automatiquement, sont visibles au catalogue et les fichiers sont consultables sur Gallica intramuros au format MP3 (les fichiers au format FLAC restent consultables sur les postes audiovisuels en salle P).

Le programme MISAOA (Mutualisation et innovation pour la sauvegarde et l’accès aux œuvres audiovisuelles françaises) porté par la BnF et le CNC a officiellement démarré le 1er juin 2020 suite à la signature des parties prenantes. Il regroupe 37 opérations réparties en neuf projets, seize chantiers, douze actions, rythmées par quinze jalons en trois ans. Les jalons 2020 concernaient d’une part la mutualisation de l’administration des postes et des serveurs du système audiovisuel par le département des Systèmes d’information ainsi que la gestion des demandes de prestation audiovisuelle, d’autre part le versement du premier fichier audio dans la chaîne de dépôt légal du son dématérialisé et sa diffusion dans Gallica intramuros. En complément, des travaux d’appropriation, de recensement et de mise en cohérence de l’archive audiovisuelle ont permis de préparer les opérations de mutualisation au niveau de l’infrastructure matérielle ainsi que d’élaborer une planification des opérations de migration vers le système de préservation SPAR de la BnF. Les instructions menées en commun avec le CNC vont permettre de passer à une phase d’expérimentation avec des acteurs du secteur proposés par les organisations professionnelles.

À terme, ces filières de dépôt légal dématérialisé seront mises en place pour les différents types de documents : presse, documents cartographiques, partitions, etc.

Dans le cadre de l’arrêté du 16 septembre 2014, la BnF déploie l’accès aux Archives de l’internet dans les bibliothèques de dépôt légal imprimeur. Ce sont ainsi 20 bibliothèques de dépôt légal imprimeur en région qui sont connectées (cf. Les pôles associés de dépôt légal imprimeur). Compte tenu de la crise sanitaire, ce déploiement a marqué le pas en 2020 mais sera poursuivi en 2021.

 

Tableau – Principales entrées par dépôt légal à la BnF

Le dépôt légal des imprimés

Le dépôt légal éditeur

Les livres

En vingt ans, le nombre de livres déposés dans les services du dépôt légal avait augmenté de près de 70%. Alors que depuis cinq ans, le chiffre de dépôts oscillait autour de 80 000 livres par an, on constate une nette baisse en 2020 avec 64 121 livres enregistrés (-19%). Cette baisse, conséquence de la crise sanitaire, a surtout été constatée au dernier trimestre de l’année.

La répartition des dépôts par catégorie de déposants confirme l’installation de l’autoédition dans le paysage éditorial français : 80% des dépôts sont le fait d’éditeurs professionnels, associatifs ou collectivités et 20% celui d’auteurs autoédités et d’éditions à compte d’auteur. Cette année encore, le premier déposant en nombre de titres est L’Harmattan et non un éditeur à compte d’auteur et d’autoédition (Books on Demand est en 2e position).

Par thématique, une large majorité (60%) des livres catalogués a rejoint le département Littérature et art, 21% est destiné au département Philosophie, histoire, sciences de l’homme, le département Droit, économie, politique reçoit 10% des monographies et celui des Sciences et techniques 9%.

Les périodiques

Avec 32 677 titres reçus en 2020, la baisse de la production se poursuit (-2%), le nombre de nouveaux titres catalogués (1 704) étant cette année encore inférieur au nombre de cessations de parution. En nombre de fascicules, ce sont 178 816 numéros qui ont été reçus par la Bibliothèque (-15%). La filière des entrées de périodiques ayant été fortement impactée par la crise sanitaire, notamment par l’interruption des circuits de mars à mai 2020, il serait imprudent d’interpréter trop rapidement ces données, que ce soit en termes de baisse de la production éditoriale ou de complétude des collections : avec la reprise progressive de l’ensemble des processus et des circuits, et notamment les résultats des relances et réclamations, c’est seulement dans le temps long qu’il sera possible d’aboutir à un bilan stabilisé.

Le département Droit, économie, politique est le premier destinataire de ces dépôts de périodiques, en proportion de titres (36% des titres collectés, parmi lesquels la presse d’information générale et les titres de publications officielles) mais surtout de fascicules, 59% des dépôts lui étant adressés.

Les brochures

Sont également entrées au titre du dépôt légal éditeur des brochures et publications diverses, traitées et conservées en « recueils » (et non à l’unité), tels que des documents publicitaires, administratifs ou à caractère politique ou religieux (tracts, affichettes). 7 732 brochures ont été déposées en 2020 (-33%).

Le dépôt légal imprimeur

Le dépôt légal des imprimeurs s’effectue auprès de la bibliothèque habilitée dans chaque région administrative de France métropolitaine et des départements et territoires d’outre-mer. Pour l’Île-de-France, c’est la BnF qui reçoit le dépôt légal imprimeur. Les bibliothèques dépositaires du dépôt légal imprimeur (BDLI) sont « pôles associés de dépôt légal imprimeur » et ont à ce titre une délégation de gestion de la BnF (cf. Les pôles associés de dépôt légal imprimeur).

Le dépôt légal des documents spécialisés et audiovisuels

Le dépôt légal des documents audiovisuels s’élève à 16 229 en 2020. Cela représente une baisse de 23% par rapport à l’année 2019 dont les chiffres exceptionnels s’expliquaient par la régularisation de plusieurs années de retard pour la vidéo, mais se situe à un niveau proche de 2018 : 16 483. L’industrie du son, de la vidéo et du multimédia n’a évidemment pas échappé au contexte sanitaire très particulier de l’année 2020, qui a profondément affecté tous les secteurs de la vie culturelle. Plusieurs éléments sont cependant à noter :

  • le vinyle représente toujours 25% des dépôts sonores, pour lesquels s’est mis en place le dépôt légal du son dématérialisé par flux, avec un nombre de dépôts sensiblement équivalent aux dépôts de documents physiques ;
  • les dépôts de vidéogrammes retrouvent presque leur niveau de 2018, après une année 2019 exceptionnelle alimentée par des dépôts de rattrapage ;
  • les multisupports continuent leur lente décrue, avec une chute de plus de 40%, due non seulement à la crise sanitaire mais aussi à une tendance générale de l’édition ;
  • pour le multimédia, le nombre de monographies déposées a augmenté de 16%, avec une prédominance du dématérialisé, grâce à plusieurs dépôts de rattrapage et l’arrivée de nouveaux déposants, et les entrées de périodiques semblent se stabiliser.

Par ailleurs, un peu plus de 6 300 documents spécialisés (partitions imprimées, cartes et plans, imagerie, photographies, etc.) sont entrés dans les collections par dépôt légal soit une baisse de 31% par rapport à 2019. Cette baisse s’explique par la chute de l’imagerie au département des estampes (-43%) et des cartes, plans et reliefs (-43%). Concernant les monnaies et médailles, les entrées par dépôt légal des monnaies sont stables (16 en 2020 et en 2019) alors que le chiffre a été divisé par deux pour les médailles (19 en 2020 contre 45 en 2019).

Ces baisses récurrentes d’une année sur l’autre s’expliquent par la part croissante des fichiers dématérialisés collectés qui ne compensent pas la chute du dépôt sur support car les dispositifs réglementaires et techniques pour le dépôt légal des documents dématérialisés ne sont pas opérationnels pour toutes les filières. Dans les années à venir, on devrait assister à une augmentation du dépôt légal des documents spécialisés avec la mise en place progressive des différentes filières de dépôt.

Le dépôt légal de l’internet

173,8 To de données ont été collectées au titre du dépôt légal de l’internet. La collecte large a représenté à elle seule 117,6 To. La collecte ciblée des sites sélectionnés par la BnF et ses partenaires s’est élevée quant à elle à 56,2 To. Le volume cumulé des Archives du web BnF a atteint 1,34 péta octets durant le mois de décembre 2020. Le dépôt légal numérique a poursuivi la collecte des vidéos en s’adaptant autant qu’il est possible à la complexité de l’architecture de sécurisation mise en place par les plateformes de diffusion.

Les efforts ont également été poursuivis pour assurer la collecte de la presse en ligne, qui porte désormais sur 49 titres de presse quotidienne nationale et régionale et 289 éditions locales, plusieurs éditions locales ayant été supprimées pendant la crise sanitaire.

Les équipes du dépôt légal du web de la BnF ont participé à plusieurs projets de recherche, notamment :

  • le projet « Lifranum » de l’Université Jean Moulin Lyon 3 et l’unité de recherche MARGE qui vise à identifier et structurer le corpus des littératures francophones nativement numériques (sites, blogs, réseaux sociaux) ;
  • le projet « BodyCapital » avec le laboratoire SAGE de l’Université de Strasbourg qui a pour but de retracer l’histoire culturelle et sociale du corps au XXe siècle en Europe au travers de l’étude de sources audiovisuelles ;
  • le projet « Les animaux dans la Grande Guerre », dont le responsable scientifique Alexandre Delaporte est chercheur associé à la BnF

Enfin, le service du dépôt légal numérique a mis à profit cette période inédite pour constituer dans les archives de l’internet une collecte exceptionnelle sur la pandémie de Covid-19 dans tous ses aspects, du confinement aux questions sociales, scientifiques, géopolitiques, etc.